AL1, l’artiste qui habille les murs de la ville de tableaux urbains
Culture

AL1, l’artiste qui habille les murs de la ville de tableaux urbains

Alain Guilloteau, plus connu du grand public sous le nom d’AL1, s’est fait particulièrement connaître des angevins ces derniers mois avec différents portraits géants affichés à travers la ville. A sa façon, le street-artiste a rendu hommage aux soignants pendant le premier confinement, au chanteur Christophe, à Samuel Paty, et plus récemment à Jean-Pierre Bacri. Rencontre avec un artiste au parcours atypique.

Alain Guilloteau (Al1)

Alain Guilloteau devant le portait de Samuel Paty encore visible place François Mitterrand – Angers.Villactu.fr

En octobre dernier, dans la rue et sur les réseaux sociaux, plusieurs millions de personnes ont pu admirer l’hommage rendu par l’artiste de street art AL1 à Samuel Paty, ce professeur d’histoire-géographie assassiné par un terroriste.

Avec ses bâtonnets de pastel, il a réalisé un portrait de deux mètres de haut du professeur, encore visible aujourd’hui place François-Mitterrand. « Je ne pensais pas que mon tableau serait vu par autant de monde. Des professeurs et des CPE m’ont téléphoné pour savoir s’ils pouvaient utiliser le portrait. La directrice de l’école où travaillait Samuel Paty m’a demandé si j’étais d’accord pour illustrer le recueil », se souvient Alain Guilloteau.

Sur les réseaux sociaux ou encore dans la rue, des milliers de personnes l’ont remercié et félicité pour ce portrait émouvant. « La culture est la seule arme contre tous les types de fanatisme », dit l’artiste pour qui « l’art est avant tout fait pour donner de l’émotion aux gens ».

Comme toutes ses créations, ce portrait sera éphémère. Dans quelques temps, lorsque le papier sera trop abimé, il ira le retirer. Au grand dam de certains passants, c’est ce qu’Alain Guilloteau a fait récemment avec le portrait de Christophe, collé en avril 2020, peu de temps après la mort du chanteur. Les murs de la maison de quartier des Trois-mâts, aux Justices, ne seront pas restés vides bien longtemps. Plus récemment, c’est le portrait de Jean-Pierre Bacri qui a remplacé celui du chanteur.

AL1 Bacri

Photo : AL1

En mai 2020, AL1 avait également marqué les esprits en rendant hommage aux personnes réquisitionnées pendant le premier confinement. « J’ai à chaque fois beaucoup de réactions. Ce qui me fait plaisir, c’est d’amener un peu de couleurs dans la morosité actuelle ».

Al1 soignants

Photo : AL1

Un parcours atypique

Passionné par l’art et le dessin depuis son plus âge, Alain Guilloteau a eu des parents qui préféraient le voir s’orienter vers l’informatique. Le vendéen d’origine a quand même passé deux années aux Beaux-Arts de Poitiers avant d’obtenir un BTS informatique. Après plusieurs années en tant qu’analyste-programmeur, il travaille ensuite à Paris dans une grande entreprise avant de revenir dans la région, où il évolue dans l’univers de la formation.

Epuisé par son travail, en novembre 2011, il fait un arrêt cardiaque avec mort subite récupérée sur le parking de son entreprise. A 48 ans, il se retrouve hospitalisé au CHU d’Angers entre la vie et la mort. Après trois semaines d’hospitalisation dont 10 jours de coma, il ressort avec 6 mois d’arrêt de travail. Cet accident est un déclic qui le pousse à revenir à ses premières amours : le dessin.

En 2013, il décide de faire du dessin son nouveau travail, même si, reconnaît-il, « en vivre est extrêmement difficile ». Sa marque de fabrique deviendra le pastel, avec lequel il travaille tous ses dessins. « Le pastel ne coûte pas cher. Ce n’est pas le matériau le plus facile à utiliser, chaque trait à son importance. Plus la création va être grande, plus les défauts vont se voir. Ça demande beaucoup de concentration, j’en rêve même la nuit. On donne beaucoup de soi… Quand j’ai fait Nelson Mandela, j’en ai pleuré. Tout ce que je fais sort de mes tripes », explique Alain Guilloteau.

Travaillant désormais que des grands formats, car « ça transmet plus d’émotions », AL1 utilise pour ses tableaux urbains du papier dessin qui n’altère pas la surface sur laquelle il colle.

« Le dessin me permet de faire passer des messages. C’est ma raison de vivre aujourd’hui. Après l’accident, j’avais besoin de crier que j’étais en vie. »

Dernière création en date : six figures emblématiques de la culture française affichées dans les rues de Nantes. Derrière, l’idée d’interpeller les gens sur la crise que traverse le milieu culturel. « La culture est oubliée… Ses acteurs sont-ils essentiels ? », interroge l’artiste angevin.