Le groupe Envie en lutte pour sa survie après une rupture de contrat
Economie

Le groupe Envie en lutte pour sa survie après une rupture de contrat

Le réseau Envie, acteur historique du réemploi d’électroménagers et de l’insertion professionnelle, est menacé par la perte d’un marché clé attribué par l’éco-organisme Ecosystem. Plus de 250 emplois pourraient disparaître.

Envie Anjou accueille des salariés en parcours d’insertion – © Angers.Villactu.fr

Depuis près de vingt ans, l’entreprise d’insertion Envie 2E Transport assurait la collecte et le tri des déchets d’équipements électriques et électroniques (D3E) dans l’Ouest de la France, en partenariat avec l’éco-organisme Ecosystem. Cette collaboration pourrait toutefois toucher à sa fin, menaçant directement plus de 125 emplois en Loire-Atlantique.

Un partenariat historique rompu

Au cœur du différend se trouve un appel d’offres lancé par Ecosystem, structure agréée par l’État et chargée d’organiser la gestion des D3E dans le cadre de la responsabilité élargie des producteurs (REP). Selon les responsables d’Envie, « les critères d’évaluation retenus par l’éco-organisme n’auraient pas pris en compte les spécificités du réemploi », pourtant au cœur des missions de l’entreprise. En conséquence, Envie 2E Transport, basée à Nantes, a perdu le marché qu’elle détenait depuis la création d’Ecosystem en 2006.

Cette rupture de contrat concerne également les antennes d’Envie à Angers (Envie Anjou), Rennes (Envie Bretagne) et Niort (Envie Poitou-Charentes). À court terme, ce sont quelque 255 emplois qui pourraient être supprimés, dont 155 occupés par des personnes en parcours d’insertion.

Une activité aux multiples enjeux

Au-delà de la seule collecte, l’activité logistique d’Envie permet de prélever des appareils encore réparables et de les reconditionner. Grâce à une méthode de tri dite « préservante », évitant d’endommager les équipements, Envie alimente une chaîne de production d’électroménagers d’occasion qui répond à la fois à des objectifs sociaux et environnementaux.

Ces missions d’intérêt général ne semblent cependant pas avoir pesé face aux offres concurrentes issues d’opérateurs davantage tournés vers le recyclage que le réemploi. Une évolution que déplorent de nombreux soutiens du réseau Envie, qui dénoncent un changement de cap dicté par des logiques de rentabilité.

Pour Elsa Richard, conseillère régionale du groupe l’Ecologie Ensemble : « Ces structures forment un maillon essentiel de la gestion durable des déchets et de l’insertion professionnelle en Pays de la Loire. Elles donnent une seconde vie aux objets et une nouvelle chance à des centaines de personnes. »

Une mobilisation politique

La décision d’Ecosystem a suscité une vague de réactions dans les territoires concernés. Le groupe écologiste du Conseil régional des Pays de la Loire a appelé l’exécutif régional à intervenir.

« La majorité régionale ne peut rester silencieuse alors que les piliers de la filière s’effondrent sur notre territoire. L’impact social et écologique serait dramatique. La présidente doit interpeller la Ministre de la transition écologique Pannier-Runacher et l’éco-organisme Ecosystem qui met brutalement fin à 19 ans de partenariat avec Envie », explique Lucie Etonno, présidente du groupe l’Ecologie Ensemble.

Dans un communiqué publié le 27 mai, les élus du groupe dénoncent « une contradiction entre les objectifs de la loi anti-gaspillage (AGEC) », qui fixe un taux de 5 % de réemploi des déchets ménagers d’ici 2030, et la majorité régionale, qui, dans ses derniers arbitrages budgétaires, « a réduit les subventions à l’économie circulaire ».

« Aujourd’hui, nous allons à rebours de ces objectifs et la Région se met en contradiction vis-à-vis de la loi », ajoute William Aucant, conseiller régional de Loire-Atlantique.

La France insoumise du Maine-et-Loire s’est également exprimée en faveur d’Envie, estimant que la mise en concurrence imposée par Ecosystem méconnaît la vocation sociale et environnementale du réseau : « Envie, c’est la possibilité pour beaucoup d’acquérir du matériel à bas coût, de permettre à des individus de se former et d’obtenir une qualification reconnue. »

Une issue judiciaire

Face au blocage des négociations, le réseau Envie a annoncé le dépôt d’un recours juridique. En parallèle, il propose à Ecosystem de poursuivre la prestation le temps de trouver une solution transitoire.

« Accepter une prolongation inférieure aux 18 mois et/ou sans garantie sur le gisement réemploi reviendrait à entériner la destruction rapide de 55 emplois à Saint-Herblain pour les activités logistiques, réemploi et support sans compter les effets domino sur le reste des 125 emplois en Loire-Atlantique », indique le réseau.

Du côté du Groupe Estille, maison mère des antennes Envie concernées, le directeur général Dominique Fièvre se dit « stupéfait qu’Ecosystem ait décidé aussi brutalement de mettre un terme à notre partenariat de près de 20 ans sur le territoire et ce, sans aucune mesure d’accompagnement crédible ». Pour lui, cette rupture est « injuste » et pourrait entraîner un « effet domino » menaçant l’ensemble des structures Envie.

Par Eline Vion.

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